Les Vagabonds

Parmi les grands monstres classiques de l’horreur figurent les vampires. Mais malgré la pléthore d’œuvres les mettant en scène depuis Dracula et Carmilla, il est rare d’en découvrir des versions réellement originales. Il y avaient ceux version « Hard SF » de Peter Watts dans Vision Aveugle et Échopraxie. Et il y a désormais Les Vagabonds de Richard Lange, dont le roman penche lui vers le road trip sociétal dans les tréfonds des États-Unis des années 1970. Pour vous donner une idée, c’est un croisement improbable entre Meurtre d’un bookmaker chinois, Paris,Texas pour les décors et De sang-froid avec certains personnages aimant un peu trop le sang.
Ce roman se déroule durant l’été 1976, peu avant les célébrations du bicentenaire du pays. Les protagonistes y passent leur temps à errer en bordure des villes à dormir dans leurs véhicules ou dans des motels miteux. Il y a Charles Sanders, un homme noir ayant abandonné son foyer depuis un an pour trouver le meurtrier de son fils. Il y a Jesse et Edgar, deux frères mal assortis, qui vivent la nuit et se terrent le jour. Et Jesse, l’aîné malgré son apparence, prend soin du plus jeune souffrant d’un handicap mental. Et il y a les Démons, un gang de motards délinquants adeptes de la consommation de drogues diverses. Ces trois histoires distinctes vont finir par se croiser dans une déflagration de violence. Avec une particularité en plus : si le père est un humain comme les autres, les deux frères et le gang sont des « vagabonds », des êtres ayant gagné une forme d’immortalité et d’autoguérison en échange de la consommation plus ou moins régulière de sang humain. Et pour éviter de se faire remarquer, ces créatures s’attaquent aux êtres en marge –, prostituées, clochards, fugueurs – et vivent le plus souvent de façon nomade. Si Jesse et Edgard sont des purs produits de l’Amérique nés au siècle précédent, certains autres « vagabonds » viennent d’Europe ou d’Afrique.
Le roman de Richard Lange est court : il ne va pas s’appesantir sur la biologie des vagabonds ni sur leurs origines ou leurs mœurs. En revanche, en sautant d’un point de vue à l’autre – quitte à nous faire parfois revivre la même situation sous deux angles différents – Les Vagabonds nous offre un voyage original. Si l’histoire se situe dans une époque passée pour nous, elle est montrée par des regards contemporains, voire plus anciens, avec des points de vue très divers tout en restant au ras du bitume. Et nous parle en pointillés, sous prétexte de vampirisme, des travers de notre société. Sentant la poussière, l’asphalte chaud, le sang, l’essence et le champagne, Les Vagabonds nous propose
un voyage au-delà du Bien et du Mal où la violence, la vengeance et le destin jouent des tours étranges à ses protagonistes. Les différents acteurs de cette histoire vous rebutent ou attirent votre compassion tour à tour, qu’ils soient humains ou hématophages. Si vous avez aimé Aux Frontières de l’aube, et que vous souhaitez en retrouver l’esprit en livre, précipitez-vous sur ce roman fascinant.

Les Vagabonds
de 
Richard Lange
traduction de David Fauquemberg

Éditions
Rivages

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