Avant Get Out et l’arrivée de Jordan Peele dans le cinéma de genre, les films d’horreur hollywoodiens (hors ceux de la blaxploitation) n’étaient pas tendres avec les personnages de couleur, et en particulier les Noirs. Ceux-ci, et surtout les femmes, qui se retrouvaient souvent victimes (et morts dans d’atroces souffrances dès la fin de la première pellicule, sauf Ben le héros malheureux de La Nuit des Morts-Vivants). Pour aller à l’encontre de cette tendance, Desiree S. Evans et Saraciea J. Fennell, deux autrices afro-américaines, ont rassemblé une anthologie de 15 nouvelles d’horreur, The Black Girl Survives in This One. Et comme son titre l’indique, toutes ces histoires ont pour protagonistes des adolescentes et jeunes femmes noires qui vont être plongées dans des situations terrifiantes… mais en sortir vivantes (du moins jusqu’à la fin de la nouvelle). Ces histoires sont souvent très courtes et dépassent rarement les vingt pages. Elles sont toutes écrites par des femmes ou des personnes non-binaires afro-américaines (et pour certaines latinx, ou originaires de régions plus précises des États-Unis, comme la Louisiane ou les Appalaches) et s’adressent à un lectorat jeune adulte (l’éditeur américain précise à partir de 12 ans).
Comme toutes les anthologies, le résultat est inégal. Certaines histoires comme Harvesters de L.L.McKinney ou Cemetery Dance Party de Saraciea J. Fennell reprennent des scénarios classiques de films d’horreur (les monstres dans le champ de maïs pour le premier, et le cimetière plein de goules dans le deuxième) tout en restant assez plaisantes. D’autres vont mêler les histoires d’horreur classiques à des traumatismes propres aux afro-américains, comme Foxhunt de Charlotte Nicole Davisx qui mêle folk horror et souvenirs de l’esclavage, Black Pride de Justina Ireland qui propose une variation plus féroce des Black Panthers ou le magnifique Black Girl Nature Group de Maika et Maritza Moulite sur la résilience familiale face à la prédation de certains Blancs.
Parfois la final girl le devient parce qu’elle accepte la part de monstre en elle, comme dans Inheritance de Camara Aaron. Enfin, dans certains textes, quand l’horreur et la pure science-fiction se mêlent les résultats sont juste de petits joyaux comme Welcome Back to the Cosmos de Kortney Cash (une histoire de fantômes errants dans l’espace), TMI de Zakiya Dalila Harris ou le très étrange The Black Strings de Vincent Tirado.
Au final, toutes les histoires de ce recueil m’ont plu, certaines (les suscitées) plus que d’autres, mais toutes ont une force, un ton ou un angle qui donne un coup de neuf à l’horreur. Seul petit reproche, le style général tient souvent du synopsis pour un film ou une BD. Mais vous passerez de très agréables moments avec ces histoires et aurez envie de vous faire un bon film d’horreur par la suite.
The Black Girl Survives in This One
Anthologie éditée par Desiree S. Evans et Saraciea J. Fennell
Éditions Flatiron Books