Saturn Return

Akane Torikai est une mangaka à ne pas mettre entre toutes les mains. Si graphiquement son style précis et doux captive et séduit, ses thématiques sont souvent dures et son propos souvent sans concession. Si je l’ai découverte avec son incursion dans la SF avec Le Siège des exilées, j’ai depuis dû lire tout ce qui est paru d’elle en français. Et j’avoue qu’avec sa nouvelle série en cours, Saturn Return, elle a encore réussi à me surprendre.
Saturn Return commence pourtant classiquement pour l’autrice, avec une protagoniste mal dans sa peau : Ritsuko Kaji, 30 ans. Après un premier roman à succès, elle n’arrive plus à écrire et s’enlise dans un mariage et une vie de femme au foyer qui ne lui conviennent pas. Quand elle apprend le suicide de l’ami qui lui a inspiré son roman, elle va enquêter sur les raisons de son acte avec son nouvel éditeur. Et ce faisant, va rouvrir des blessures anciennes et en créer de nouvelles.
Avec Saturn Return, Akane Torikai adopte les codes du polar. De prime abord, moins viscéralement émotionnelle que En proie au silence, cette nouvelle série cache bien son jeu et avance crescendo. J’avais trouvé le premier tome suffisamment intéressant pour réserver la suite en librairie, mais pas assez pour en parler de suite ici. Il faut dire qu’il posait les différents personnages et le début de l’intrigue, mais qu’il ne débordait pas forcément d’action. Avec le deuxième volume, Akane Torikai nous envoie dans une direction totalement différente et le rythme est nettement plus soutenu jusqu’à la fin et le « Quoi ? Mais ça ne peut pas s’arrêter là ? Je veux savoir ! » provoqué par les dernières pages.
Nous y découvrons que
Ritsuko Kaji est une narratrice bien peu fiable, tout comme le sont tous les autres personnages de l’histoire. De son nouvel éditeur prêt à toutes les compromissions, quitte à donner son corps contre une idée, pour obtenir un nouveau roman à l’ami disparu adepte des comportements limite, en passant par les ex et le mari actuel et son obsession pour la mettre enceinte, aucun d’entre eux n’est sans reproche. Tous ont des secrets empilés sur d’autres secrets et tout l’art de la mangaka est de nous donner envie de les découvrir peu à peu. En alternant les styles graphiques (notamment pour distinguer les souvenirs et les passages rêvés) et avec quelques cases extrêmement puissantes qui restent longtemps en tête, Akane Torikai signe encore une fois une histoire forte et passionnante qui en dit long sur les femmes et le mal-être dans la société japonaise en général. Attention, elle ne prend pas de gants et certains thèmes abordés peuvent heurter la sensibilité d’une partie du lectorat. Personnellement je signe direct pour le tome 3.

Saturn Return
d’
Akane Torikai
traduction de
Gaeëlle Ruel
Éditions
Akata

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