Les Hauts de Hurle-vent

Il suffit parfois de tomber sur une vidéo au hasard pour avoir envie de se replonger dans une lecture vieille de… plus de 30 ans. En l’occurrence, Les Hauts de Hurle-vent d’Emily Brontë (avec la graphie du lieu proposée par le deuxième traducteur du roman, la première traduction s’intitulant Un amant), lu adolescente. Le roman tiendrait-il la route face à mes yeux d’adulte ? Eh bien… oui ! Même si, objectivement, il n’y a rien qui va dans cette histoire. C’est, pour reprendre une expression marketing à la mode, de la dark romance avant l’heure. Parmi tous les personnages, toutes générations confondues dans l’histoire d’Emily Brontë, il n’y a que deux personnes à peu près normales : Mr Lockwood, le locataire d’Heathcliff qui cherche à s’isoler du brouhaha de la ville en s’exilant sur la lande pour plusieurs mois, et Hélène « Nelly » Dean, la femme de charge de la maison qu’il loue qui va lui raconter l’histoire de son propriétaire et des familles voisines Earnshaw et Linton. Tous les autres, y compris le médecin Mr Kenneth qu’on pourrait accuser a minima de complicité passive et de non-dénonciation de crime, sont soit victimes, soit coupables (et le plus souvent les deux) de violences conjugales, intrafamiliales et ne sont guère sympathiques.
Et pourtant, l’autrice nous happe avec ses descriptions, ses portraits de personnages et son récit. Elle a un don pour à la fois éluder le plus dur (les coups sont rarement clairement indiqués, mais sont entendus à travers une cloison), rendre ses personnages particulièrement vivants et attachants (tout en étant comme Catherine première du nom et le fameux Heathcliff, parfaitement odieux de leur plus jeune âge à leur mort) tout en laissant une très grande place à l’imagination de son lectorat. Un exemple ? Heathcliff est décrit à son arrivée comme un gamin « noir d’aspect » à l’âge indéterminé, mais dont la peau blêmit, aux allures de bohémien (ce qui sous-entendrait des origines européennes) mais qui pourrait aussi être le fils d’un prince de Chine ou d’Inde. Adulte, il est grand et fort, avec des cheveux et des yeux noirs. Et les autres personnages ne sont guère plus décrits. Cette possibilité laissé
e à chacun de coller les traits de son choix sur les acteurs de cette histoire explique peut-être pourquoi cette tragédie campagnarde écrite en 1847 résonne toujours autant presque deux siècles plus tard. Et pourquoi elle a eu autant de déclinaisons et d’adaptations à travers le temps.
Suivant vos goûts, vous pourrez lire Les Hauts de Hurle-vent en différents formats (numérique, papier avec toutes les tailles possibles, audio) et avec différentes traductions. N’ayant pas retrouvé mon vieux livre d’adolescente, ma relecture s’est faite via une version libre de droits avec la deuxième traduction francophone connue.
Même si la couverture n’est pas la plus attrayante qui soit.

Les Hauts de Hurle-vent
d’
Emily Brontë
traduction de Frédéric Delebecque (1925)

via le site Ebooks libres et gratuits

Cette publication a un commentaire

  1. Tororo

    Je n’ai lu que deux des traductions de ce livre (il ya longtemps, et mes souvenirs des qualités de ces traductions sont trop imprécis pour que j’en recommande une) mais je me souviens (la mémoire est une chose bizarre) que le préfacier d’une de ces éditions qualifiait Mr Lockwood de « pompeux imbécile ». Ça m’avait paru sévère, mais pas injuste; le petit nombre d’idées personnelles qu’émet Mr Lockwood m’avait laissé l’impression qu’Emily Brontë ne tenait pas les gens normaux en très haute estime.

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