Après une première partie, Le Serpent, se déroulant dans la Venise du XVIIe siècle, la Maison des Jeux de Claire North nous entraîne désormais avec Le Voleur dans la Thaïlande de 1938, à l’heure où les empires coloniaux britanniques et français connaissent leur dernier souffle et où l’impérialisme japonais attise les tensions dans toute l’Asie du Sud-Est. Cette nouvelle partie voit s’affronter deux joueurs, Rémy Burke et Abhik Lee, dans une gigantesque partie de cache-cache à travers tout le pays. Mais cette partie est déséquilibrée dès le départ et derrière les deux joueurs s’en cachent d’autres et une partie encore plus grande et aux enjeux autrement plus colossaux qu’une où ne se jouent après tout que des vies et leurs souvenirs…
Si vous n’avez pas lu Le Serpent, vous pouvez toujours prendre le jeu en cours de route. Thene, la protagoniste de la première partie et un autre personnage y font leurs apparitions, mais l’histoire de Le Voleur se tient parfaitement toute seule. Avec toujours cette mise à distance du récit qui nous est narré par un observateur extérieur (qui se permet de commenter l’action des joueurs ou de nous livrer un aperçu du passé et du futur des gens qu’ils croisent), qui peut plaire ou rebuter. Même s’il semble que, dans ce volume, l’observateur ne soit pas si impartial qu’il y paraît et que l’on se surprend à essayer de deviner son identité. Là où dans Le Serpent, le principal intérêt de l’histoire était le portrait de Thene et la façon dont celle-ci s’affirmait à travers le jeu et la partie en cours ; ici, Rémy et Abhik sont presque secondaires. Ce qui marque le plus ce sont les rencontres faites par Rémy durant sa fuite, les différents portraits d’une Thaïlande oubliée et correspondant pourtant si bien à ce que notre imaginaire occidental en devine. Avec pour ma part, une mention spéciale pour Fon et le vieux pêcheur. Notons d’ailleurs en passant un portrait au vitriol du colon britannique raciste et condescendant avec le couple dans le train dégouté par l’apparition d’un joueur (lui aussi britannique, mais cachant son identité). L’autre attrait à mes yeux du Voleur est de lever un peu plus le voile sur le fonctionnement de la Maison des Jeux et sur les règles qui président à son fonctionnement. Et du coup, je serais présente en 2023 pour la troisième — et dernière ? — partie au sein de cette Maison des Jeux.
Le Voleur
La Maison des Jeux t.2
de Claire North
traduction de Michel Pagel
Éditions Le Bélial’