J’ai beau lire de la science-fiction depuis des décennies, je n’avais encore jamais osé ouvrir un livre d’Octavia E. Butler. Pourquoi ? Parce qu’elle fait partie de ces plumes présentées comme « incontournables » et souvent citées comme référence pour son message politique et la force de son engagement. Or moi quand je lis un roman c’est avant tout pour m’évader, découvrir autre chose et pas pour refaire un cours de philosophie, d’éthique ou de géopolitique (même si par ailleurs, ce sont des sujets qui m’intéressent). Je craignais donc de me retrouver face à une messagère militante et non une conteuse.
Et puis… L’Aube est arrivé. Avec son histoire de contact avec une espèce extra-terrestre (thème dont je suis friande), avec Lilith sa protagoniste qui force la lectrice à se demander si elle ferait les mêmes choix et surtout avec un récit prenant dont on ne sait jamais où il nous mène et rempli du « sense of wonder » qui m’a personnellement d’abord attiré vers la science-fiction.
L’Aube nous raconte donc l’histoire de Lilith Iyapo qui se réveille nue dans une pièce blanche sans ouvertures visibles. Elle ne sait pas combien de temps s’est écoulé depuis son endormissement ni à qui appartiennent les voix qui la bombardent de questions. Peu à peu, la vérité apparaît : elle a dormi 250 ans et la Terre qu’elle a connue a été presque détruite par un conflit nucléaire. Des extra-terrestres négociants ont sauvé le plus d’humains possibles et sont désormais prêts à réacclimater les survivants sur terre. Mais à des conditions telles qu’il serait difficile de considérer les nouveaux habitants comme des humains. Acceptera-t-elle cette proposition ? Et les autres humains aussi ?
Écrit en 1987, l’Aube garde le meilleur des récits de science-fiction de cette époque avec des extra-terrestres que leurs apparences, leurs modes de vie et leurs pouvoirs rendent réellement aliens à tout ce qu’on peut connaître. L’action est riche et rentre directement dans le vif du sujet et même si tout nous est raconté du point de vue de Lilith, l’ensemble des personnages – humains ou non – a suffisamment d’épaisseur pour qu’on se prenne d’intérêt pour leurs aventures. Mais c’est également, et c’est bien ainsi qu’on m’a vendu l’autrice, une réflexion approfondie sur la liberté et la servitude, la définition de l’humanité, les rapports entre hommes et femmes, etc. Sauf que… Octavia E. Butler ne prêche pas. Elle nous conte une histoire : celle de Lilith et de ses choix, des joies et des souffrances qui en découlent. Libre à nous de les interpréter comme l’on veut et de se dire « à sa place, aurais-je accepté ça ? » Et à la toute fin, il ne reste plus qu’une envie : découvrir la suite de la trilogie.
L’Aube – Xenogenesis t.1
d’Octavia E.Butler
traduction de Jessica Shapiro
Éditions Au Diable vauvert