Fascinée par le Rossignol d’Audrey Pleynet, j’attendais beaucoup de son roman au format plus long, Sintonia, et de sa couverture splendide également… Et le résultat m’a surpris.
Ici, nous ne sommes plus dans un futur lointain au plus profond de l’espace. Mais trois siècles dans le futur et en Europe, principalement à Venise. L’histoire commence par l’éradication quasi totale des Sintonia, une guilde d’assassines de mères en filles. Seules quatre sœurs survivent : Talia et ses filles Irène et Gia, Azzura, Agnese et Reyna. Vont-elles se venger, survivre ou gagner leur indépendance grâce à ce massacre ?
Ayant longtemps joué à Assassin’s Creed et ayant un gros faible pour les épisodes mettant en scène Ezio en Italie, je n’ai pu m’empêcher d’y trouver des ressemblances que ce soit dans les méthodes d’assassinat (à la dague principalement) et d’infiltration des Sintonia (qui passent pas mal de temps sur les toits ou à s’infiltrer, déguisées) ou dans les enjeux finaux du livre (les Parques rappelant les Divinités du monde d’Assassin’s Creed et les nanites ont parfois un comportement assez proche de l’Animus du jeu). Ce qui a rendu mon expérience de lecture encore plus agréable et m’a permis de passer certains passages plus agaçants (comme ceux de Reyna, la sœur que j’appréciais le moins ou le début d’Agnese plus confus).
Pour autant, ne vous y trompez pas : Sintonia est bien un roman de science-fiction avec des usages futuristes des nanotechnologies et des manipulations génétiques. Comme le Diapason qui unit les différents membres des Sintonia et qui permet un contrôle parfait des corps de leurs descendantes par les matriarches qui se servent de celui-ci pour mener à bien leur mission, ou dans certaines villes dévoyées (comme Londres ou Amsterdam) pour leurs petits jeux sadiques de pouvoir. Et l’histoire, racontée à tour de rôle par chacune des sœurs survivantes, nous montre une humanité bien différente de celles du XXIe siècle, mais toujours aussi divisée en fonction de son statut social, de son lieu d’habitation plus ou moins à l’abri des pollutions de l’air et du sol, ou de son appartenance à une guilde ou non. Et ce qui pourrait paraître durant tout le premier tiers comme un simple roman de survie et de vengeance se révèle totalement différent dans la suite à mesure que les sœurs prennent leur indépendance par rapport à leurs vies passées et que chacune, de son côté, découvre des secrets liés à sa guilde et l’organisation même du monde dans lequel elles évoluent. De plus, il est particulièrement plaisant de voir un livre présentant le point de vue de femmes matures (entre la fin de la vingtaine et le début de la quarantaine), et non d’adolescentes. Malgré leurs formations meurtrières, elles ne sont pas toutes uniquement dans l’action, dans la machination ou la vengeance. Et elles cherchent plus, chacune à sa manière, à se reconstituer une famille qui correspond plus à leurs besoins ou leurs aspirations.
L’ensemble forme l’équivalent littéraire d’un film d’espionnage futuriste, avec, derrière les scènes d’action, des considérations très intéressantes sur la liberté, la famille ou les limites de la science. N’est pas le propre d’un bon livre de SF que de distraire sa lectrice et tout en lui offrant en prime matière à réflexion ?
Sintonia
D’Audrey Pleynet
Éditions Le Bélial’