Parfois au détour d’un salon, une connaissance vous met un manga entre les mains avec deux arguments : « c’est tout doux » et « c’est un one-shot ». Et parfois, cela suffit. Les Lueurs de l’Outre-Monde à l’annonce ne m’avait pas particulièrement happé, mais, dans l’ambiance de Japan Expo je me suis laissée tenter. Et l’ai lu tranquillement le lendemain.
Le tout est une bonne pioche très agréable. L’histoire parle d’enfants « démons » (attention, pas au sens occidental moderne du terme qui impliquerait une malveillance, mais plus au sens gréco-romain d’entité surnaturelle indéfinie) chargés de récolter les âmes des morts pour les aider à passer dans l’Outre-monde en attendant de renaître. Quand deux d’entre eux tombent soudain sur un jeune homme capable de les voir et d’interagir avec eux, ils acceptent de l’aider à apaiser les fantômes.
Là où d’autres mangakas se seraient lancés dans une série à répétition avec un chapitre ou un volume par histoire de fantômes à soulager les fantômes, l’auteur se concentre sur l’histoire de Torasuke, le plus jeune des enfants démons et sur le lien qu’il tisse avec Sôma, l’humain capable de le voir. De plus, en ayant choisi l’ère Meiji (soit le tout début du XXe siècle), il nous plonge à la fois dans un passé lointain propice aux contes tout en gardant des touches de modernités dans l’histoire. Et s’il prend quelques libertés (c’est une nochère et non une entité masculine qui conduit les âmes vers Enma, le roi des enfers et juge des morts), Yamakujira s’appuie sur les croyances classiques mélangeant bouddhisme et shintoïsme pour raconter un récit centré sur les liens que nous tissons au long d’une vie et la façon dont la mort n’est finalement qu’une étape de plus dans notre parcours.
Malgré sa thématique (et à une case près), ce titre est plutôt tout public, car le mangaka arrive à parler en douceur de thèmes difficiles et de peurs enfantines. En effet, Torasuke et ses amis ont peur de la vie, comme nombre d’enfants de leur âge apparent peuvent avoir peur de la mort. Et, en mêlant comédie et action, Les Lueurs de l’Outre-Monde est aussi un moyen de les rassurer. Et comme c’est un volume unique, les parents ne se retrouvent pas embarqués dans un saga à rallonge. À noter que, graphiquement, les « monstres » surnaturels ne sont jamais réellement effrayants. Et que, mine de rien, ce titre regorge d’information sur l’histoire, la vie quotidienne et les croyances d’un Japon au passé pas si lointain ?
Les Lueurs de l’Outre-Monde
De Yamakujira
traduction de Xavière Daumarie
Éditions Kurokawa