Laissez-nous lire (ou pas) en paix !

Moi, vous me connaissez ? J’adore lire. Mais je déteste par-dessus tout qu’on me dise quoi faire (et je déteste tout autant dire aux autres quoi faire). Et c’est valable également en ce qui concerne la lecture. Donc, quand, en une matinée, j’ai des amis qui se sentent coupables de ne pas lire autant qu’ils le voudraient, je tombe sur un article selon lequel les hommes devraient lire plus de romans (sans aller plus loin que le premier paragraphe, paywall le réservant aux abonnés oblige), j’entends une énième fois (en bibliothèque en plus !) « Non, va prendre un vrai livre et pose ce manga ! », ben… je m’agace un peu…

Lire est une compétence pratique acquise le plus souvent à l’école (et parfois avant ou après, suivant les aléas de la vie). Pour se débrouiller correctement dans la vie quotidienne, elle est très utile : lire un contrat de travail, un bail, un mode d’emploi, les directions de son GPS, les prix au moment de faire les courses, ses factures, etc. Mais quand il s’agit d’une activité de loisir, la lecture n’est pas une obligation ! Et il n’y a pas de complexe à avoir ou de supériorité à mettre en avant parce que vous lisez ou non. Que ce soit des essais ou des romans, des manuels pratiques (oui, collectionner des patrons de coutures ou des manuels de jardinage et se plonger de dedans est aussi de la lecture), des magazines, des fiches cuisine ou la boîte de céréales le matin, lisez ce que vous voulez si vous en avez envie ! Et de la façon que vous le voulez : sur papier, en numérique avec un appareil dédié (liseuse) ou non, en écoutant vos livres dans les transports, en voiture ou en faisant le ménage si vous y arrivez (moi, non : le son seul ne retient pas mon attention)… Lisez du texte seul, ou du texte avec des images (de la BD européenne ou des chapitres de webtoon sur votre smartphone), des livres ou des magazines, peu importe : c’est toujours lire, quel que soit votre format de prédilection.

Et à quelle fréquence ? Mais celle que vous voulez ! Oui, il existe plein de défis lecture aux quatre coins du Web (y compris ici et), mais ce sont… des jeux, sans récompenses à la fin, autres que le plaisir d’avoir découvert de nouveaux titres. Parfois, vous n’avez pas du tout envie de vous plonger dans un bouquin, pendant des jours, des semaines, des mois (et dans certains cas même) des années. Et alors ? L’envie reviendra peut-être au moment où vous vous y attendrez le moins. Peut-être justement en passant à un autre format de lecture ou un autre type. Vous êtes du genre à lire lentement en avançant de 4 ou 5 pages ici et là ? OK. Vous dévorez des pavés de 500 pages et plus en quelques heures ? Tant mieux. Mais, au final, que vous ayez lu 5 livres ou 300 en un an, l’important n’est-il pas simplement : avez-vous pris du plaisir en les lisant ?

De même, les réseaux sociaux vont promouvoir les livres du moment à la mode, et souvent avec des modes passant tellement vite qu’à peine le livre achevé, il semble déjà « has-been ». Et souvent ce sont de beaux livres (avec de belles couvertures colorées, du jaspage aka les dessins sur la tranche) avec des « goodies » parfois distribués aux influenceurs pour faire de belles images ou de belles vidéos attirant les vues. Si vous aimez avoir de très belles bibliothèques ou si vous aimez l’objet « livre » en lui-même, il faut reconnaître qu’en ce moment, dans quasi tous les genres de littératures, il y a de quoi se faire plaisir. Mais vous n’avez pas le temps, l’envie ou les moyens de courir après les nouveautés ? Aucun souci. Lisez ce qui vous fait plaisir, même si ce n’est pas le dernier ouvrage de telle autrice à la mode ou tel sous-sous-genre ayant le vent en poupe. Et même si le livre qui vous plaît n’est pas sorti la semaine dernière, l’année dernière ou même le siècle dernier. Certaines personnes préféreront ne lire que des classiques, d’autres voudront explorer les nouveautés. Certaines ne voudront lire qu’un seul genre de livres, d’autres préféreront multiplier les genres différents. Faites comme vous le sentez. Si vous êtes ici, vous savez que mes genres de prédilection sont avant tout l’imaginaire, mais qu’il m’arrive aussi de lire des polars ou de la littérature générale, mais ce n’est pas parce que j’ai personnellement la romance et les livres d’histoire militaires en horreur, que je méprise les lecteurs de romance ou de récits militaires. De même qu’un adulte se plonge avec délice dans une BD ou un roman jeunesse ne me choque pas plus qu’une personne ne lisant exclusivement que des mangas ou Midi Olympique. La lecture est un plaisir et n’est pas une compétition ni en termes de quantité de pages lues ni en termes de qualité. En dehors d’une activité scolaire ou professionnelle (où le fait d’avoir des ouvrages imposés à lire se justifie par autre chose que « lire pour lire »), que vous aimiez lire Balzac, Flaubert ou Anna Gavalda ou Gilles Lejardinier, la jauge est identique : quelle plume vous satisfait le plus, vous ? Et pas que vont penser les autres de vos lectures ? L’opinion d’autrui dans un loisir personnel, sans danger direct ou indirect (oui l’opinion d’autrui importe quand il s’agit d’assurer votre sécurité physique ou celle des autres : suivre les règlements d’une activité sportive, passer un permis avion ou plongée, ça compte.), n’a aucun intérêt. Alors, lisez si vous avez envie, ce qu’il vous plaît, autant que vous voulez et quand vous le souhaitez. Et… fichez la paix aux lecteurs (et aux autres) !

PS Oui, les livres coutent cher. Et de plus en plus. Pourtant, il existe des solutions pour lire à moindre coût. La première étant les bibliothèques (et les boites à livres). Et si vous habitez trop loin ou que vous ne pouvez pas vous déplacer, il existe de multiples ressources – légales – en ligne pour obtenir des livres tombés dans le domaine public, ou en prêt. N’ayez pas de remords, même ainsi vous ne léserez pas les auteurices. Les prêts en bibliothèques permettent de toucher quelques sous grâce à La Sofia (et les ventes en numérique aussi). Sinon n’hésitez pas à prendre des livres de seconde main chez les bouquinistes, dans les brocantes ou simplement en les empruntant à des amis (pensez juste à les rendre).

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